From PRCF
French
A propos des récentes publications de la direction du KKE : consensus sinon rien ou bien centralisme démocratique ?
Notre position refusant fermement la dissolution, le 09 septembre 2023, de l’Initiative Européenne des Partis Communistes et Ouvriers a reçu une réplique peu amène de la direction actuelle du Parti communiste de Grèce (KKE) qui s’apparente davantage à une fin de non-recevoir et à un refus de débattre qu’à une réponse, et nous le déplorons.
Alors que nous pointions le fait que cette dissolution avait été décrétée unilatéralement par l’orateur du KKE, et ce, sans débat, sans majorité et sans vote (!), la direction actuelle du KKE n’a trouvé à répliquer que le fait que les décisions avaient toujours été prises à l’unanimité. Précisément, quoi qu’on pense de ce procédé qui, en effet, laissait déjà à désirer, il n’y avait aucune unanimité, ni a fortiori de majorité, en faveur de cette liquidation pure et simple !
Evidemment nous savions que cette dissolution arriverait, résultat de ce sectarisme qui empêche depuis trop longtemps la renaissance d’une Internationale alors qu’aujourd’hui le KKE est un des seuls partis à en avoir à la fois la volonté et les moyens pratiques.
Cette énième occurrence de désaccord non résolu par l’échange et la confrontation de points de vue ne fait qu’exacerber la différence fondamentale entre la direction actuelle du KKE et le PRCF : face à notre pratique du centralisme démocratique, la direction actuelle du KKE entend opposer une stratégie du « consensus sinon rien ». Cette voie ne peut mener nulle part.
La direction actuelle du KKE prétend que le PRCF soutient la bourgeoisie russe. C’est au mieux de la caricature, au pire de la calomnie. Nous condamnons régulièrement les agissements des miliciens de Wagner – au Mali par exemple. A l’occasion de notre commémoration de la victoire de Stalingrad ainsi que cette année à la Fête de l’Humanité, nous avons invité Vladimir Bessonov, membre en exil du Parti communiste de la Fédération de Russie, condamné par le pouvoir russe pour ses activités d’opposant et qu’on peut donc difficilement le classer comme soutien au pouvoir russe. En Ukraine par contre, les « matières premières, parts de marché et profits du capital » qui reviendraient à la Russie en cas de victoire militaire nous semblent totalement secondaires par rapport à la nécessité vitale, bien comprise par l’écrasante majorité des citoyens russes, de défendre leur territoire et de freiner l’expansion de l’OTAN. Le rôle d’un parti communiste n’est il pas de combattre sa propre bourgeoisie, c’est à dire dans le cas français, la bourgeoisie française qui prend totalement part aux projet de l’UE-OTAN de confrontation militaire avec la Russie ?
Surtout, il faut bien comprendre que le débat sur l’existence ou non d’un impérialisme russe n’est pas le seul facteur déterminant puisqu’en 1935, Georges Dimitrov avait démontré que dans la guerre à venir il ne fallait certainement pas renvoyer dos à dos l’impérialisme occidental et le nazisme, ennemi principal. C’est la question de l’hégémonisme qui est pour l’heure déterminante.
Le PRCF n’a jamais défendu l’idée – récurrente dans les critiques venant de la direction actuelle du KKE – qu’un monde multipolaire serait préférable pour les travailleurs ou conduirait au socialisme. Les soutiens tactiques que nous donnons aux BRICS ne visent qu’à affaiblir l’impérialisme dominant, pas à lui en préférer un autre.
Lénine préconisait l’analyse concrète de la situation concrète. La direction actuelle du KKE nous donne l’impression de l’ignorer complètement pour affirmer que la nature d’un conflit ne dépend que d’une analyse théorique des participants, quelles que soient les circonstances. Ainsi, pour la direction actuelle du KKE, n’importe quelle guerre entre les Etats-Unis et la Chine serait inter-impérialiste.
La comparaison avec la Première Guerre mondiale ne tient pourtant pas : toutes les grandes puissances jugeaient de leur intérêt de préparer cette guerre quand aujourd’hui, la Chine populaire n’en veut pas. La Chine populaire restant une économie socialiste avec marché où 80% des secteurs clefs sont contrôlés par l’Etat, lui même dirigé par un puissant Parti Communiste qui a triomphé de la Contre-Révolution à Tienanmen en 1989, le mécanisme de la baisse tendancielle du taux de profit cause motrice de l’impérialiste ne peut jouer en faveur d’un conflit. Pour preuve, la Chine ne possède qu’une seule base militaire à l’étranger, à Djibouti, lorsque les Etats-Unis en possèdent 800. Cette disproportion criante n’est jamais reflétée dans le discours « ni ni » de la direction actuelle du KKE, lequel laisse parfois la place à des dérives qui découlent naturellement de cette cécité initiale, notamment le passage du « ni ni » au soutien implicite à la force impérialiste qui règne dans la propre sphère d’influence du KKE, l’OTAN. Nous en voulons pour preuve le discours de l’ex-secrétaire générale Aleka Papariga déclarant : « Le peuple ukrainien mène une juste guerre » (ο ουκρανικός λαός κάνει δίκαιο πόλεμο), sans préciser, il est vrai, si cette guerre sainte se fait selon elle sous la bannière du Wolfsangel de triste mémoire dans notre pays, ou sous celle de Stepan Bandera.
Face à ces dérives inadmissibles et au lieu de balayer devant sa porte, la direction actuelle du KKE nous reproche sans cesse, et semble-t-il plus qu’à d’autres, notre participation à la Plateforme anti-impérialiste mondiale fondée à Paris en 2022. Nous revendiquons sans détour notre travail au sein de celle-ci et continuerons de contribuer à la défense de la paix mondiale dans cet espace d’expression et d’action commune entre partis, organisations voire Etats visant à empêcher une Troisième guerre mondiale dont nous n’avons, hélas, jamais été aussi proches. Nous considérons que l’existence de la Plate-forme anti-impérialiste mondiale en tant que Front anti-impérialiste est aujourd’hui indispensable, et que la direction actuelle du KKE gagnerait à y participer pour y faire peser sa voix plutôt que de fuir le débat à la moindre dissonance.
En même temps, nous considérons toujours qu’un large Front anti-impérialiste, aussi nécessaire et vital qu’il soit, ne saurait à lui tout seul pallier la dissolution de l’Internationale communiste en 1943, a fortiori dans un contexte de crise grave du Mouvement communiste international et nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour la renaissance de la Troisième internationale regroupant exclusivement les divers partis communistes. Le prolétariat mondial a plus que jamais besoin d’une telle organisation où les communistes authentiques et sincères s’unissent malgré leurs divergences, où le sens d’être communiste n’est pas soumis à l’appréciation de telle ou telle analyse ou à telle ou telle ligne mais sur la base de principes communs ou de 21 conditions. La Troisième Internationale ainsi reformée, loin de se confondre avec le front anti-impérialiste, s’articulerait avec celui-ci d’une manière proche de celle définie lors de son septième et dernier congrès en 1935.
C’est cette politique, et non la stratégie classe contre classe, qui a mené l’URSS et le camp antifasciste à la victoire, ne l’oublions jamais.
Ces précisions faites, nous saluons évidemment les actions du KKE qui, éloignées de ses discours schématiques et péremptoires, effectuent un travail utile contre l’UE-OTAN en Europe. Nous continuons de soutenir le KKE pour son action indispensable parmi la classe ouvrière de son pays. Nous ne pouvons pas accepter la qualification d’anti-KKE alors que nous n’avons fait qu’ouvrir un débat en relevant des divergences, quand nous n’avons jamais cessé – jusqu’aux élections de cette année – de soutenir ni de féliciter régulièrement le KKE pour son travail et ses luttes.
English
On the recent publications of the KKE leadership: consensus or nothing, or democratic centralism?
Our position firmly rejecting the dissolution of the European Initiative of Communist and Workers’ Parties on 09 September 2023 has received a rather unwelcoming reply from the current leadership of the Communist Party of Greece (KKE), which is more akin to a rejection and a refusal to debate than a response, and we deplore this.
When we pointed out that this dissolution had been decreed unilaterally by the speaker of KKE, without debate, without a majority and without a vote (!), the current leadership of KKE only responded by pointing out that decisions had always been taken unanimously. Precisely, whatever one thinks of this procedure which, in fact, already left something to be desired, there was no unanimity, nor a fortiori any majority, in favour of this pure and simple liquidation!
Of course we knew that this dissolution would happen, as a result of the sectarianism which for too long has prevented the rebirth of an International, even though today KKE is one of the only parties to have both the will and the practical means to do so.
This umpteenth instance of disagreement unresolved by the exchange and confrontation of points of view only serves to exacerbate the fundamental difference between the current leadership of the KKE and the PRCF: faced with our practice of democratic centralism, the current leadership of the KKE intends to oppose a strategy of “consensus or nothing”. This path can lead nowhere.
The current leadership of the KKE claims that the PRCF supports the Russian bourgeoisie. This is at best caricature, at worst slander. We regularly condemn the actions of Wagner’s militiamen- in Mali, for example. On the occasion of our commemoration of the victory of Stalingrad and this year at the Fête de l’Humanité, we invited Vladimir Bessonov, a member in exile of the Communist Party of the Russian Federation, who has been condemned by the Russian authorities for his opposition activities and can therefore hardly be classified as a supporter of the Russian authorities. In Ukraine, on the other hand, the « raw materials, market shares and capital profits » that would accrue to Russia in the event of a military victory seem to us to be totally secondary to the vital need, well understood by the overwhelming majority of Russian citizens, to defend their territory and curb the expansion of NATO. Isn’t the role of a communist party to fight its own bourgeoisie, that is to say, in the case of France, the French bourgeoisie which is totally involved in the EU-NATO project of military confrontation with Russia?
Above all, it is important to understand that the debate on the existence or not of Russian imperialism is not the only decisive factor. In 1935, George Dimitrov demonstrated that in the war to come, Western imperialism and Nazism, the main enemy, should certainly not be pitted against each other. It is the question of hegemony that is decisive at the moment.
The PRCF has never defended the idea – recurrent in the criticisms coming from the current leadership of the KKE – that a multipolar world would be better for workers or would lead to socialism. The tactical support we give to the BRICS only aims to weaken the dominant imperialism, not to prefer another.
Lenin advocated the concrete analysis of the concrete situation. The current leadership of KKE gives us the impression of completely ignoring him in order to assert that the nature of a conflict depends only on a theoretical analysis by the participants, whatever the circumstances. Thus,for the current leadership of KKE, any war between the United States and China would be inter- imperialist.
The comparison with the First World War does not hold, however: all the major powers considered it in their interests to prepare for this war, whereas today, the People’s Republic of China does not want it. Since the People’s Republic of China is still a socialist market economy where 80% of the key sectors are controlled by the state, which itself is run by a powerful Communist Party that triumphed over the counter-revolution at Tiananmen in 1989, the mechanism of the downward trend in the rate of profit, the driving force behind imperialism, cannot be used to justify a conflict. As proof of this, China has only one military base abroad, in Djibouti, while the United States has 800. This blatant disproportion is never reflected in the “neither nor” discourse of the current leadership of KKE, which sometimes leaves room for drifts which naturally follow from this initial blindness, in particular the passage from “neither nor” to implicit support for the imperialist force which reigns in KKE’s own sphere of influence, NATO. Proof of this is the speech by former General Secretary Aleka Papariga declaring: “The Ukrainian people are fighting a just war”(ο ουκρανικός λαός κάνει δίκαιο πόλεμο), without specifying, it is true, whether this holy war is being fought according to her under the banner of the Wolfsangel of sad memory in our country, or under that of Stepan Bandera.
In the face of these unacceptable excesses, and instead of putting its own house in order, the current leadership of KKE constantly reproaches us, and it seems more than others, for our participation in the World Anti-Imperialist Platform founded in Paris in 2022. We are unapologetic about our work within the Platform and will continue to contribute to the defence of world peace in this space of expression and joint action between parties, organisations and even states aimed at preventing a Third World War, which, alas, we have never been so close to. We consider that the existence of the World Anti-Imperialist Platform as an Anti-Imperialist Front is indispensable today, and that the current leadership of KKE would gain by participating in it to make its voice heard rather than fleeing the debate at the slightest dissonance.
At the same time, we still believe that a broad anti-imperialist front, necessary and vital though it is, cannot on its own make up for the dissolution of the Communist International in 1943, all the more so in a context of serious crisis for the International Communist Movement, and we will do everything in our power to bring about the rebirth of the Third International, bringing together exclusively the various Communist parties. The world proletariat needs more than ever such an organisation where genuine and sincere communists unite despite their differences, where the meaning of being communist is not subject to the appreciation of this or that analysis or this or that line but on the basis of common principles or 21 conditions. The Third International thus reformed, far from being confused with the anti-imperialist front, would articulate itself with the latter in a manner close to that defined at its seventh and last congress in 1935.
We must never forget that it was this policy, and not the class against class strategy, that led the USSR and the anti-fascist camp to victory.
Having made these clarifications, we obviously welcome the actions of KKE which, far from its schematic and peremptory speeches, are carrying out useful work against the EU-NATO in Europe. We continue to support KKE for its indispensable action among the working class of its country. We cannot accept the label of anti-KKE when all we have done is open a debate by pointing out differences, when we have never ceased – until this year’s elections – to support and regularly congratulate KKE for its work and its struggles.
Finally, if it is the workers who make the final judgement, we humbly ask the current leadership of KKE whether it would not be more constructive to listen to the workers in each
country rather than to maintain on life-support small groups, such as the PCRF in France, which no French worker knows, on the sole pretext that they are copying the line politically established in Athens. If support for organisations of communist reconstruction is necessary in the case of a historic party which has undergone a eurocommunist mutation like the P “C” F, it is much more questionable to support an organisation other than the communist party when it has not undergone this type of mutation on the pretext that its line displeases some people, as in Russia or Ukraine for example. On the contrary, the PRCF has never sought any interlocutor in Greece other than its legitimate party, the KKE, and will continue to do so as long as the latter’s attitude towards us permits.
The objective of PRCF communists is the rebirth of the Communist Party in France, and these practices do nothing to help build the unity of communists that should be our absolute priority.